ZOOM : LES COULISSES DE LA REMISE DU ROSAIRE DE SAINT-CHAMANT

Remise du rosaire de Saint-Chamant

Dans le cadre du Plan de Mise en Sécurité des objets mobiliers des édifices cultuels publics du Cantal (plan MES) piloté par le Conseil départemental du Cantal en lien avec la DRAC-Auvergne et la Région, et bénéficiant d’une aide départementale au titre des Objets non protégés au titre des Monuments Historiques, le tableau de la Remise du rosaire de Saint-Chamant a fait l’objet d’une restauration.

LES COULISSES DE LA REMISE DU ROSAIRE DE SAINT-CHAMANT

La restauration des toiles peintes s’apparente parfois à une fouille archéologique comme en témoigne celle de la toile de la Remise du Rosaire de l’église de Saint-Chamant. Cette toile peinte du XVIIe siècle, de 145 x 162 cm, représente la Vierge remettant le rosaire à saint Dominique et à sainte Catherine de Sienne. La scène est environnée de médaillons représentant les quinze mystères du rosaire.

LES TRACES DE LA DERNIÈRE RESTAURATION

La toile est composée de trois lés. Usée et oxydée, elle avait été renforcée à une époque ancienne par un marouflage sur une épaisseur allant jusqu’à trois millimètres. Cette couche est constituée de papiers issus d’imprimés et de manuscrits collés probablement avec une colle animale, renforcée dans les coins par l’application de morceaux de toile grossière. Les papiers utilisés sont d’origine variée : pages de plusieurs numéros du Mercure de France sur une période s’étalant du 18 juin 1783 à 1790 ; fragments de livres de comptes, de calendriers, de listes manuscrites et d’écrits divers. Une curiosité : on relève même un formulaire administratif  par lequel les officiers de la municipalité devaient accuser réception des lettres patentes du 24 mars 1790 signées par « Louis par la grace de Dieu & par la Loi constitutionnelle de l’Etat, Roi des François » concernant justement de biens domaniaux et ecclésiastiques !

Ironie peut-être involontaire des restaurateurs de la fin du XVIIIe siècle ou du début XIXe siècle, qui utilisèrent les papiers de la « spoliation » pour restaurer l’œuvre et, grâce à elle, le culte interdit sous la Terreur. Ainsi commença la France concordataire, qui vit refleurir les confréries, notamment celles du rosaire. « Habent sua fata libelli » (Les papiers ont leur destinée), comme dit l’adage. Ce travail amateur, résultat du recyclage et du détournement de fragments de documents, a fait ses preuves : outre qu’il permit la bonne conservation du tableau jusqu’à nos jours, il donna à l’œuvre une nouvelle vie et, en permettant sa repose dans l’église, suscita probablement le regain de la ferveur des paroissiens du XIXe.

Le marouflage, devenu inutile du fait de la restauration de 2012-2013, a été déposé, comme archives communales de Saint-Chamant, aux Archives départementales. Il conserve le témoignage de l’histoire du tableau, de Saint-Chamant, de la période révolutionnaire et de la dévotion mariale.

L’intéressant marouflage sera l’objet du document du mois de juillet des Archives Départementales du Cantal.

Pour plus d’information, on trouvera, dans la Revue de la Haute-Auvergne (2013, tome 2), un article sur cette œuvre, son contexte et sa restauration.